par Mathieu Trachman, Institut national d’études démographiques, Paris, Professeur invité MSH
avec la DISCO et CLARA
La notion de fantasme tient une place particulière dans les débats sur la pornographie. En définissant leur métier comme la représentation des fantasmes du public, les pornographes les constituent en mises en image inoffensives qui ne font que traduire les désirs des consommateurs. Celles et ceux qui luttent contre la pornographie affirment que cette conception ne vise qu’à légitimer des représentations sexistes ou nocives pour les publics vulnérables en occultant les rapports de domination dans lesquelles elles prennent place – selon l’expression de Catharine MacKinnon, la pornographie ce n’est pas « que des mots ». La question n’est pas seulement celle des effets de la pornographie mais celle des conceptions des fantasmes qui sous-tendent ces positions, comme sphère indépendante des pratiques sexuelles, volet psychique de l’oppression des femmes ou catégorie qui déréalise les violences subies par les actrices pornographiques et les femmes dans leur ensemble. De ce point de vue, c’est autant dans la régulation politique des représentations de la sexualité que dans l’émergence d’une sphère fantasmatique autonome vis-à-vis des pratiques sexuelles que la pornographie s’inscrit. C’est à la place de la pornographie dans cette politique des désirs que cette intervention est consacrée : quelles sont les conceptions des fantasmes qui sous-tendent les pratiques et les débats autour de la pornographie ? Qui délimite les frontières de la sphère fantasmatique, pour quels objectifs et selon quels critères ? Quels sont les enjeux d’une politique des désirs ?
Biographie :
Mathieu Trachman est sociologue à l’Institut national d’études démographiques, Paris, et coresponsable du master "Genre, politique et sexualité" de l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Il a notamment publié
Le travail pornographique. Enquête sur la production de fantasmes (La Découverte, 2013), avec Laure Bereni,
Le genre. Théories et controverses (Puf, 2014) et l’entrée "Désir(s)" dans
L’encyclopédie critique du genre (La Découverte, 2016). Il travaille actuellement sur les violences de genre, les sexualités minoritaires et les enjeux méthodologiques que posent les analyses contemporaines des homosexualités.
Mardi 21 novembre de 17 à 19h
Salle Henri Janne (15
e étage)
Institut de Sociologie
Avenue Jeanne 44 – 1050 Bruxelles