par Luis Martinez, Sciences Po-CERI, Professeur invité MSH
Le Séminaire des Mondes Musulmans et Arabes Contemporains (SMMAC) de l'OMAM en partenariat avec le REPI a le plaisir d'accueillir M. Luis Martinez, politiste, directeur de recherche Science-Po-CERI, pour une conférence intitulée "Comment expliquer l'échec du hirak en Algérie ?"
Entre 2019 et 2020, un mouvement de contestation populaire inédit, le Hirak, ambitionne de changer pacifiquement le régime et d’instaurer un Etat de droit. Inspiré alors par « le succès » de la révolution tunisienne, alors l’unique exemple de changement pacifique de régime dans la région avec la transition soudanaise à l’œuvre depuis la destitution de Omar el Bechir, le 11 avril 2019, les contestataires restent convaincus de parvenir à instaurer un « Etat civil et non militaire » comme le proclame un de leurs slogans. Les manifestants opèrent une relecture de l’histoire de l’Algérie post-coloniale, ils soulignent le détournement de la révolution de 1954 par les « militaires » et font resurgir des figures historiques marginalisées par l’historiographie nationale comme Abbane, « l’homme du Congrès de la Soumman, assassiné en 1957, Larbi Ben M’hidi, le chef de la bataille d’Alger, Ali la pointe…. Le Hirak également fait resurgir la question de « l’indépendance confisquée » évoquée par Ferhat Abbas, ancien président du GPRA : « Ce 5 juillet 2019, les quotidiens francophones algériens sont au diapason : « Du jamais vu depuis 1962 » pour El Watan ; « La RUE s’approprie le 5 juillet » pour Le Soir d’Algérie ; « Rendez-nous notre indépendance » pour Liberté. Dans la rue : « Oh ! Viva l’Algérie ! Yetnahaw gaâ ! » (Oh ! Vive l’Algérie ! Qu’ils dégagent tous !), « Algérie libre et démocratique », « Le système, dégage ! ». Mais c’est probablement « Le peuple veut l’indépendance ! » qui est le slogan le plus entendu. Le mouvement est alors à sa vingtième semaine ». En 2022, le hirak a presque disparu de l’espace public. Le Hirak algérien, peut-il disparaitre comme a disparu le mouvement du 22 février au Maroc ? Peu étudié, la disparition d’un mouvement social est pourtant est une réalité politique. Il reste à comprendre les raisons qui expliquent comment un mouvement social d’une telle ampleur peut-il disparaitre. Que s’est-il passé avec le hirak algérien ? Entre 2020 et 2024, le régime politique algérien a reconstitué ses réseaux et ses ressources, il a redoté les institutions d’acteurs politiques à même de faire fonctionner l’Etat. Le vide laissé par la démission forcée d’A. Bouteflika est comblé. Le mouvement originel Hirak est fini et la restauration autoritaire du régime laisse peu d’espoir, à court terme, de revoir ce mouvement resurgir dans l’espace publique. Il reste que ce mouvement inédit en Algérie est parvenu pendant moins de deux ans à susciter un enthousiasme et une espérance qui sera difficile de faire oublier. Il reste à voir quels partis politiques ou leader sera à même de transformer cette extraordinaire élan de la société civile en force politique à même de peser sur le régime pour se transformer.
Politiste, directeur de recherche à Sciences Po-CERI, Luis Martinez a obtenu un doctorat en sciences politiques à Sciences Po en 1996. Il a été professeur invité à la School of International and Public Affairs à Columbia University, New York (2000-2001) puis à l’université de Montréal (2007-2008). En 2010-2011, Luis Martinez a été détaché à l'Ecole de la gouvernance et d'économie de Rabat puis au département des sciences politiques de l'université internationale de Rabat (UIR). Rattaché au CERI depuis 1996, ses recherches portent sur la violence politique, les guerres civiles, islamisme et djihadisme, les politiques de sécurités. Il a été directeur scientifique au sein du projet européen PPREVUE (Programme de prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent en Afrique) de 2015 à 2019. Il est l’auteur de : Afrique : le prochain Califat ? Editions Tallandier, 2023 ; Afrique du Nord après les révoltes arabes, Presses de sciences po, 2019. ; Algeria. From Opacity to Complexity. Hurst/Oxford, 2016 ; Violence de la rente pétrolière (Algérie, Libye et Irak), Presses de Sciences Po, 2010. (version en anglais, Hurst/Columbia University Press, 2012) ; The Libyan Paradox. London : Hurst/Columbia University, 2007 ;The Enigma of Islamist Violence, with A. Blom, L Bucaille (eds) . London : Hurst/Columbia University, 2007 and La guerre civile en Algérie. Paris : Karthala, 1998 (version en anglais Hurst/Columbia University Press, 2000.
SMMAC "Comment expliquer l'échec du hirak en Algérie ?"
Le 07/02/2024
par Luis Martinez, Sciences Po-CERI, Professeur invité MSH
Le Séminaire des Mondes Musulmans et Arabes Contemporains (SMMAC) de l'OMAM en partenariat avec le REPI a le plaisir d'accueillir M. Luis Martinez, politiste, directeur de recherche Science-Po-CERI, pour une conférence intitulée "Comment expliquer l'échec du hirak en Algérie ?"
Entre 2019 et 2020, un mouvement de contestation populaire inédit, le Hirak, ambitionne de changer pacifiquement le régime et d’instaurer un Etat de droit. Inspiré alors par « le succès » de la révolution tunisienne, alors l’unique exemple de changement pacifique de régime dans la région avec la transition soudanaise à l’œuvre depuis la destitution de Omar el Bechir, le 11 avril 2019, les contestataires restent convaincus de parvenir à instaurer un « Etat civil et non militaire » comme le proclame un de leurs slogans. Les manifestants opèrent une relecture de l’histoire de l’Algérie post-coloniale, ils soulignent le détournement de la révolution de 1954 par les « militaires » et font resurgir des figures historiques marginalisées par l’historiographie nationale comme Abbane, « l’homme du Congrès de la Soumman, assassiné en 1957, Larbi Ben M’hidi, le chef de la bataille d’Alger, Ali la pointe…. Le Hirak également fait resurgir la question de « l’indépendance confisquée » évoquée par Ferhat Abbas, ancien président du GPRA : « Ce 5 juillet 2019, les quotidiens francophones algériens sont au diapason : « Du jamais vu depuis 1962 » pour El Watan ; « La RUE s’approprie le 5 juillet » pour Le Soir d’Algérie ; « Rendez-nous notre indépendance » pour Liberté. Dans la rue : « Oh ! Viva l’Algérie ! Yetnahaw gaâ ! » (Oh ! Vive l’Algérie ! Qu’ils dégagent tous !), « Algérie libre et démocratique », « Le système, dégage ! ». Mais c’est probablement « Le peuple veut l’indépendance ! » qui est le slogan le plus entendu. Le mouvement est alors à sa vingtième semaine ». En 2022, le hirak a presque disparu de l’espace public. Le Hirak algérien, peut-il disparaitre comme a disparu le mouvement du 22 février au Maroc ? Peu étudié, la disparition d’un mouvement social est pourtant est une réalité politique. Il reste à comprendre les raisons qui expliquent comment un mouvement social d’une telle ampleur peut-il disparaitre. Que s’est-il passé avec le hirak algérien ? Entre 2020 et 2024, le régime politique algérien a reconstitué ses réseaux et ses ressources, il a redoté les institutions d’acteurs politiques à même de faire fonctionner l’Etat. Le vide laissé par la démission forcée d’A. Bouteflika est comblé. Le mouvement originel Hirak est fini et la restauration autoritaire du régime laisse peu d’espoir, à court terme, de revoir ce mouvement resurgir dans l’espace publique. Il reste que ce mouvement inédit en Algérie est parvenu pendant moins de deux ans à susciter un enthousiasme et une espérance qui sera difficile de faire oublier. Il reste à voir quels partis politiques ou leader sera à même de transformer cette extraordinaire élan de la société civile en force politique à même de peser sur le régime pour se transformer.
Politiste, directeur de recherche à Sciences Po-CERI, Luis Martinez a obtenu un doctorat en sciences politiques à Sciences Po en 1996. Il a été professeur invité à la School of International and Public Affairs à Columbia University, New York (2000-2001) puis à l’université de Montréal (2007-2008). En 2010-2011, Luis Martinez a été détaché à l'Ecole de la gouvernance et d'économie de Rabat puis au département des sciences politiques de l'université internationale de Rabat (UIR). Rattaché au CERI depuis 1996, ses recherches portent sur la violence politique, les guerres civiles, islamisme et djihadisme, les politiques de sécurités. Il a été directeur scientifique au sein du projet européen PPREVUE (Programme de prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent en Afrique) de 2015 à 2019. Il est l’auteur de : Afrique : le prochain Califat ? Editions Tallandier, 2023 ; Afrique du Nord après les révoltes arabes, Presses de sciences po, 2019. ; Algeria. From Opacity to Complexity. Hurst/Oxford, 2016 ; Violence de la rente pétrolière (Algérie, Libye et Irak), Presses de Sciences Po, 2010. (version en anglais, Hurst/Columbia University Press, 2012) ; The Libyan Paradox. London : Hurst/Columbia University, 2007 ;The Enigma of Islamist Violence, with A. Blom, L Bucaille (eds) . London : Hurst/Columbia University, 2007 and La guerre civile en Algérie. Paris : Karthala, 1998 (version en anglais Hurst/Columbia University Press, 2000.
Mercredi 7 février 2024 de 12h à 14h
Salle Geremek
Institut d'Études Européennes
Avenue F. Roosevelt 39
1000 Bruxelles
Inscription par mail : omam@ulb.be